Du 15 août au au 20 septembre, une centaine de makers va bâtir un village de la transition énergétique au château de Millemont. Co-fondateur du collectif OuiShare, dédié à la consommation collaborative, Benjamin Tincq est l’un des initiateurs de ce projet baptisé POC 21. Interview.
Le projet POC21, qu’est ce que c’est ?
Depuis plusieurs années on voit passer des projets durables très inspirants dans le domaine de l’écologie portés par les mondes de l’innovation open-source, des fablabs et des makers. Par exemple dans l’habitat, avec Wikihouse, cette maison en bois facile à construire et dont les plans sont librement accessibles. Dans les transports, avec Wikispeed, une voiture électrique conçue de manière collaborative par des passionnés du monde entier. Ou encore l’énergie (OpenEnergyMonitor), l’alimentation (Peer-to-peer Food Lab) ou l’agriculture (Open Source Ecology). Toutes ces solutions sont intéressantes mais elles s’adressent à une niche et à un public initié. La question est maintenant de savoir comment faire pour que le grand public puisse être touché par ces projets, les fabriquer, les acheter. Notre objectif est de faire émerger le sujet de l’innovation distribuée dans le cadre du débat sur la transition énergétique, qui s’amplifie à l’approche de la conférence COP21.
Concrètement, comment allez-vous mettre en valeur ces initiatives ?
Du 15 août au au 20 septembre, une centaine de participants vont fabriquer un véritable village de la transition énergétique au château de Millemont, dans les Yvelines, à 45 minutes de Paris. Un appel aux candidatures est ouvert jusqu’au 24 avril et douze projets seront retenus dans les domaines de l’énergie, de l’habitat, de la mobilité, l’alimentation, l’économie circulaire… Le lieu sera équipé avec tout l’équipement des hackerspaces et fablabs modernes. Des designeurs, ingénieurs, commerciaux, communicants seront présents sur place pour aider les participants à porter leurs projet au niveau de maturité et de perfectionnement requis pour une diffusion au grand public. Le but est d’arriver à créer une vitrine, un showroom de l’écologie en open-source qui sera ouvert au public.
Un sondage récent montre que le discours catastrophiste sur le climat ne porte pas ses fruits mais que les Français sont prêts à agir si on leur montre que des solutions existent. C’est le but de POC21 ?
Tout à fait. L’opinion publique ne croit plus vraiment aux négociations diplomatiques. Les ONG l’ont compris et se tournent de plus en plus vers un discours qui met en valeur les solutions. POC21, c’est un jeu de mot autour de « Proof-of concept » : démontrer que ces solutions peuvent passer du concept à la preuve et fonctionner. Encore faut-il réussir à les rendre inspirants. Souvent, les inventions des fablabs sont mal mises en valeur. Il nous faut des projets « sexy comme Apple mais ouverts comme Linux ».
Comment l’open-source peut-être une réponse adaptée au problème global et planétaire que constitue le changement climatique ?
C’est un mode de développement qui permet de créer des solutions économique avec une collectivisation de l’effort et une mutualisation de la recherche. Malheureusement il reste mal connu. Les acteurs qui travaillent sur la transition énergétique et les makers communiquent peu. Notre but est de faire bouger les choses. Des industriels commencent à trouver cela intéressant, on le voit avec la décision de Tesla de passer certains de ses brevets dans le domaine public. Du côté politique, nous avons reçu le soutien d’Axelle Lemaire. Des collectivités, des ministères pourraient comprendre l’intérêt de l’open-source sur les marchés publics. De grandes écoles de management, de commerce ou d’ingénieurs pourraient l’intégrer dans les cours. Mais avant tout, c’est au grand public de s’en emparer !